En présentant NEON au CES 2020, Star LABS nous fait sauter à pieds joints dans la vallée dérangeante. On passe sans transition du chatbot à l’humain artificiel ! Ainsi, si NEON semble tout droit venir de l’an 3020, quel sera son impact sur nous, pauvres humains non-artificiels ?
En janvier 2020 au CES de Las Vegas, STAR Labs, filiale de Samsung et non de DC Comics, a présenté son projet NEON. Derrière ce noble nom se cache ni plus ni moins que la promesse d’êtres humains artificiels. Pourquoi et comment, me demanderez-vous ? Ce n’est pas le sujet que je souhaite aborder aujourd’hui. Ce que je veux évoquer ici, c’est plutôt le rapport de l’être humain avec les créations artificielles qui lui ressemblent. Pour ce faire, je m’appuierai sur la théorie de la vallée dérangeante.
Dans la vallée oh oh de l’IA lalilala
Décrite par Mori Masahiro en 1970, la vallée dérangeante, ou vallée de l’étrange, ou encore uncanny valley, peut se résumer comme étant l’intervalle où l’affinité d’un être humain pour une entité lui ressemblant est négative. Prenons des exemples. Un robot industriel est majoritairement bien perçu par les êtres humains, car il ne nous ressemble pas tant que ça. L’androïde idéal aura de grandes chances d’être également bien perçu par un être humain. Ce dernier n’étant alors plus capable de différencier un humain d’un androïde. La vallée dérangeante se trouve quelque part entre ces deux exemples.
Des imperfections visuelles ou comportementales, ou au contraire une trop grande perfection, qu’il s’agisse d’un robot ou d’une IA, rappellent aux humains qu’ils sont en face d’une machine. Une machine qui tente de les reproduire. Dans ces circonstances, un certain malaise s’installe chez l’être humain. Car si nous sommes plus empathiques et confiants envers ce qui nous ressemble, nous avons tout de même nos limites ! Dès lors, dans le cas de NEON, à quelle étape nous trouvons-nous ?
Vallée dérangeante : c’est quand qu’on arrive ?
Selon STAR Labs, NEON serait à terme capable de développer ses propres incarnations et personnalités. Cela afin de s’adapter à diverses situations. Ce qui est tout à fait pertinent dans le cadre des interactions humaines. Certains contextes nécessitent notamment plus d’empathie que d’autres, par exemple. Mais je n’entrerai pas plus ici dans les débats ô combien intéressants liés à l’éthique de la robotique.
Finalement, NEON se place-t-il (ou elle, d’ailleurs) dans la vallée dérangeante ? Il est trop tôt pour répondre à cette question. Néanmoins ses débuts risquent d’être difficiles. D’une part car NEON apprendra essentiellement au contact d’autres êtres humains. Il lui faudra donc collecter de nombreuses données pour ajuster son niveau d’imperfection. D’autre part, le dispositif en lui-même me fait personnellement penser aux chatbots.
À leur arrivée, la chronique s’était déchaînée : le lendemain, tout le monde allait parler avec des chatbots, par écrit ou oralement ! Si les assistants virtuels rencontrent un certain succès, de récents événements me font penser le contraire en ce qui concerne les chatbots. Avez-vous ouvert l’application Messenger sur votre smartphone, récemment ? Vous avez peut-être remarqué la disparition d’un onglet destiné à présenter divers chatbots. Du côté de Facebook, il semble donc que l’accent soit davantage mis sur les relations entre êtres humains. Alors peut-on prédire aujourd’hui ce qu’il en sera de nos relations avec les humains artificiels ?
Olivier Menguy